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CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE VANNES
14 rue Richement -3è étage -
BP 66 56002 VANNES CEDEX

JUGEMENT DU 25 NOVEMBRE 2002

Qualification
Contradictoire
PremierRessort

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

RG N° F 01/00255 à 01/00269
SECTION Commerce

AFFAIRE

CREQUER-GOURLAY S.- GOURLAY E.-GUILLO-LAGATU- GUYONVARCH-LEALOI-LE BRAS- LE BRUN-MALABOEUF-MOREL- MONTMEAT-OLLIVE-TANGUY- VALSEMEY-
Syndicat SUD-PTT Morbihan

contre
DIRECTION DEPARTEMENTALE DE LA POSTE DU MORBIHAN


Audience de plaidoierie du 1er juillet 2002


Monsieur Daniel CREQUER...

Madame Nadine MOREL...
Présents,

Monsieur Stéphane GOURLAY...

Mademoiselle Edith GOURLAY ...

Madame Marie-Laure GUILLO...

Madame Yveline GUYONVARC'H...

Monsieur Soane Patita LEALOI...

Mademoiselle Stéphanie LE BRAS...

Monsieur Stéphane LE BRUN...

Madame Valérie MALABOEUF...

Monsieur Yvonnig MONTMEAT...

Mademoiselle Murielle OLLIVE ...

Mademoiselle Roselyne TANGUY...

Monsieur André VALSEMEY...
absents;


DEMANDEURS,
représentés par Me Me DUMONT (Avocat au barreau de VANNES) de la SCP GUITARD, GUILLOU-MOINARD; COLON DE FRANCIOSI, CAMPAS, DUMONT

Le Syndicat SUD-PTT MORBIHAN


INTERVENANT VOLONTAIRE
absent, représenté par Me Me DUMONT (Avocat au barreau de VANNES) de la SCP GUITARD, GUILLOU-MOINARD, COLON DE FRANCIOSI, CAMPAS, DUMONT

LA DIRECTION DEPARTEMENTALE DE LA POSTE DU MORBIHAN
27 Place de la République 56019 VANNES CEDEX

DEFENDERESSE, représentée par Me RAOUL-BOURLES (Avocate au barreau de VANNES) de la SCP BOEDEC, RAOUL-BOURLES

 

- Composition du bureau de jugement lors des débats et du délibéré
Monsieur GENILLARD, Président Conseiller (S)
Monsieur DENIAUD, Assesseur Conseiller (S)
Monsieur ARDERIEU, Assesseur Conseiller (E)
Monsieur DELAMOTTE,' Assesseur Conseiller (E)
Assistés lors des débats et du prononcé de M. LACOUA, ^Greffier.

PROCEDURE


- Date de la réception de la demande : 03 Septembre 2001
- Bureau de Conciliation du 08 Octobre 2001
- Renvoi au bureau de Jugement du 21 Janvier 02, 29 Avril 02
- Débats à l'audience de Jugement du 01 Juillet 2002
- Prononcé de la décision fixé à la date du 16 Septembre 2002
- Délibéré reporté au 07 Octobre 2002, puis au 25 Novembre 2002



 

Le 30 Avril 2001, les demandeurs saisissaient la formation des référés du Conseil de Prud'hommes de VANNES aux fins de voir condamner la DIRECTION DEPARTEMENTALE DE LA POSTE DU MORBIHAN à leur verser diverses sommes au titre de rappel de salaire, des congés payés y afférents et de l'article 700 du NCPC.

Par ordonnance du 30 Mai 2001, la formation de référé décidait que les demandes excédaient ses pouvoirs.

Les demandeurs engageaient une procédure au fond, la conciliation n'aboutissant à aucun accord.

 

 

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

 

POUR LES DEMANDEURS



Sur la compétence du Conseil de Prud'hommes de VANNES


LA POSTE soulève l'incompétence du Conseil des Prud'hommes de VANNES en concluant que la décision prise concernant les agents doit être analysée comme une décision réglementaire et administrative, dont il appartient aux seules juridictions administratives d'apprécier la légalité.

LA POSTE demande donc au Conseil de constater une question préjudicielle et de renvoyer les parties à se pourvoir devant la juridiction administrative.

Aux termes de l'article 74 du NCPC, les exceptions doivent, à peine d'irrégularité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond et fins de non recevoir.

Or, le litige qui oppose les demandeurs et LA POSTE a fait l'objet d'une procédure devant la formation des référés du Conseil de VANNES, qui a rendu sa décision le 30 mai 2001 et, à aucun moment, LA POSTE n'a soulevé l'existence d'une question préjudicielle remettant en cause le Conseil de VANNES.
LA POSTE n'a pas plus soulevé cette exception lors de l'audience de conciliation du 08 Octobre 2000.

Dès lors, la DIRECTION DEPARTEMENTALE DE LA POSTE verra sa demande rejetée.

A titre subsidiaire, la demande de sursis à statuer devra être rejetée. LA POSTE estime que la retenue de l/30ème du salaire mensuel pour l'ensemble des agents est une décision à caractère générale et impersonnelle, donc une décision administrative à caractère réglementaire. A l'appui de son argumentation, LA POSTE cite une décision du Tribunal des Conflits en date du 22 Juin 1992.

Mais contrairement à l'hypothèse visée dans la décision du Tribunal des Conflits le litige soumis au Conseil de Prud'hommes dans le cadre de la présente affaire n'implique nullement l'appréciation de la légalité d'un quelconque acte réglementaire.

LA POSTE a procédé à des retenues sur salaire de façon individuelle pour chaque salarié sans qu'une décision expresse ait été prise fixant les modalités des retenues sur salaire en cas de grève pour l'ensemble-dès salariés,Il en va de même pour la décision prise par la Cour d'Appel de PARIS du 31/05/2002.

Contrairement à ce qu'affirmé LA POSTE, la solution du présent litige n'a pas pour effet d'amener le juge à apprécier la légalité d'une décision à caractère réglementaire prise par LA POSTE puisqu'une telle décision n'existe pas.

Le Conseil de Prud'hommes est ici le seul compétent. C'est à cette conclusion qu'est arrivé le Conseil de Prud'hommes de MONTPELLIER le 21 mars 2002.

 

 

Sur les règles applicables concernant la retenue sur salaire des salariés grévistes


a) Les demandeurs ont été embauchés par LA POSTE sous contrat de droit privé. Ils sont soumis aux règles du Code du Travail et relèvent de la compétence dû Conseil de Prud'hommes.

La retenue opérée sur les salaires des grévistes doit être strictement proportionnelle à la durée de l'arrêt de travail.

Par ailleurs les articles L 521-2 et suivants du Code du Travail précisent les règles applicables à l'exercice du droit de grève dans le secteur public.

S'agissant des retenues sur le salaire, une distinction doit être opérée :
-concernant le personnel de l'Etat et des collectivités locales, la cessation concertée du travail pendant une durée inférieure à une journée de travail donne lieu à retenue égale à la rémunération afférente à cette journée,
-concernant les agents des autres services publics, personnel des entreprises publiques, industrielles et commerciales, la retenue sur salaire est égale à l/60ème du traitement mensuel (article 2 de la Loi n°82-889 du 19/10/1982).

Dans la mesure où les salariés sous contrat de droit privé de LA POSTE relèvent des dispositions de l'article L 521-6 du Code du Travail, la retenue sur salaire opérée pour les salariés grévistes aurait dû être proportionnelle à la durée de l'absence.


b) Contrairement à ce qu'indique LA POSTE, il n'est pas possible d'appliquer aux agents contractuels les dispositions de l'article 1er de la loi du 19 octobre 1982, dans la mesure où cet article a été abrogé par la loi du 30 juillet 1987.

Les salariés de droit privé de LA POSTE sont soumis, comme l'ensemble des salariés, en l'absence de dérogation expresse, aux dispositions du Code du Travail comme le mentionne expressément le Loi n° 90.568 du 02 Juillet 1990 relative à l'organisation du service public de LA POSTE. Il importe peu que les salariés de LA POSTE bénéficient d'un salaire qui se liquide par mois.

Il sera intéressant de prendre connaissance du courrier adressé par LA POSTE à M. VALSEMEY le 15 mai 2001 en réponse à des demandes d'attribution d'un complément Poste et d'un salaire identique à ceux versés aux fonctionnaires de même niveau.

LA POSTE ne peut refuser cet alignement, ce qu'elle fait, alors que pour l'exercice du droit de grève-elle entend aligner le régime de ses agents contractuels de droit privé sur celui des agents publics qui est beaucoup moins favorable.

c) II est intéressant de noter que, s'agissant du droit de grève, on peut voir à FRANCE TELECOM que ce n'est pas le statut de l'entreprise qui est pris en compte mais celui des agents qui la composent. Un raisonnement identique doit être suivi par LA POSTE.

d) II faudra noter que le Tribunal de Grande Instance de CAEN relève que, lorsque LA POSTE emploie en application de l'article 31 de la loi du 02 juillet 1990, des agents contractuels dans les conditions de droit privé, elle est soumise au Code du Travail, sauf dérogation particulière. Un raisonnement identique peut être suivi s'agissant de l'exercice du droit de grève.
Les agents contractuels sont de droit privé. Les demandeurs sont donc en droit de prétendre au règlement d'un rappel de salaire correspondant à la différence entre la retenue à laquelle a procédé l'employeur et la retenue à laquelle il était en droit de procéder, soit pour :


-M. CREQUER Daniel la somme de 70,99 €
-M. GOURLAY Stéphane la somme de 70,99 €
-Mlle GOURLAY Edith la somme de 62,18 €
-Mme GUILLO Marie-Laure la somme de 70,99 €
-Mme GUYONVARCH Yveline la somme de 71,46 €
-M. LAGATU Yann la somme de 36,75 €
-M. LEALOI Soane Patita la somme de 34,20 €
-Mlle LE BRAS Stéphanie la somme de 70,99 €
-M. LEBRUN Stéphane la somme de 72,03 €
-Mlle MOREL Nadine la somme de 70,99 €
-M. VALSEMEY André la somme de 70,99 €
-Mlle TANGUY Roselyne la somme de 36,28 €
-Mme MALABOEUF Valérie la somme de 70,99 €
-M. MONTMEAT Yvonnig la somme de 70,99 €
-Mme OLLIVE Murielle la somme de 70,99 € [;;

 

Sur l'intervention volontaire du syndicat SUD PTT du Morbihan


Exerçant son droit au titre de l'article L 411-11 du Code du Travail, le syndicat SUD PTT du MORBIHAN considère que la retenue sur salaire qui n'est pas proportionnelle à la durée ; de l'absence en cas de grève. Il demande donc la condamnation de LA POSTE à lui verser la somme de 1 € à titre de dommages et intérêts.

 

Sur les frais irrépétibles


Les demandeurs ont dû engager des frais pour assurer la défense de leurs intérêts. L'employeur sera condamné à verser à chacun d'entre eux la somme de 762,25 € au titre de l'article 700 du NCPC.

L'employeur se verra également condamné à verser au syndicat SUD PTT du MORBIHAN
la somme de 760 € au titre des dispositions de l'article 700 du NCPC. LA POSTE du MORBIHAN sera condamnée aux entiers dépens.

 

POUR LA PARTIE DEFENDERESSE


Sur la compétence du Conseil de Prud'hommes de VANNES

La décision de LA POSTE doit être analysée comme une décision réglementaire et administrative dont il appartient aux seules juridictions administratives d'apprécier la légalité.

LA POSTE est un établissement public de type industriel et commercial qui, bien que se trouvant dans un rapport de droit privé avec ses salariés de droit privé, n'en prend pas moins des décisions à caractère général et impersonnel qui sont des décisions administratives.

La remise en cause de la décision qui nous intéresse par les juridictions de l'ordre judiciaire auquel appartiennent les juridictions du travail, porterait gravement atteinte au principe de la séparation des pouvoirs des ordres des juridictions administratives et judiciaires résultant de l'application de l'article 13 de la Loi des 16 et 24 août 1790 et du décret du 16 Fructidor an III.

Le Tribunal des Conflits a considéré que le juge judiciaire ne saurait écarter l'application d'un acte administratif réglementaire au profit d'une disposition du Code du Travail sans porter atteinte au principe fondamental de la séparation des pouvoirs des deux ordres.

La légalité de la décision de LA POSTE d'appliquer à l'ensemble de ses personnels les mêmes modalités de retenues sur salaire en cas de grève est donc une question sérieuse dont la solution est nécessaire au règlement du litige dont la juridiction prud'homale est saisie.

Il est donc demandé que les parties soient renvoyées à se pourvoir devant la juridiction administrative et de surseoir à statuer jusqu'à la décision du juge administratif.

En ce qui concerne l'exception d'incompétence soulevée par LA POSTE, il faut noter que la formation des référés du dit Conseil a donné satisfaction à LA POSTE en déboutant les demandeurs. Que l'audience du 08 Octobre 2001 n'était qu'une audience de tentative de conciliation et que la procédure de référé et au fond sont deux procédures différentes et la direction de LA POSTE a soulevé l'exception de procédure dans ses premières écritures avant toute défense au fond. Elle est donc parfaitement recevable à soulever l'exception tirée de la question préjudicielle.

 

Sur l'ordonnance de référé du Conseil de Prud'hommes de MONTPELLIER


La décision présentée par les demandeurs n'est pas pertinente, car le Conseil de MONTPELLIER aurait dû s'interroger sur la nature de la décision de LA POSTE en cause alors qu'il s'est fondé uniquement sur la nature de relation de travail qui n'était pas contestée. Par ailleurs, dès lors que le Conseil a jugé qu'il s'agissait d'un arrêt de travail spontané et non d'une grève, les textes invoqués par LA POSTE dans la présente instance n'avaient pas à s'appliquer.

 

Sur les règles applicables


Un accord collectif appelé "Convention commune POSTE-FRANCE TELECOM" a été conclu le 04 Novembre 1991 entre les deux exploitants publics et plusieurs organisations syndicales représentatives au plan national.

Il ressort de ce texte que coexistent au sein de LA POSTE deux types de personnel régis par des statuts différents :
-des personnels de droit public qui obéissent aux règles applicables aux fonctionnaires et aux agents publics non fonctionnaires,
-des personnels de droit privé soumis aux dispositions du Code du Travail et de la Convention Commune.

Toutefois le législateur a estimé, sur quelques points, que l'ensemble du personnel d'une même catégorie d'établissement devait être régi par les mêmes règles. Il s'agit de ne plus considérer le statut du personnel en cause, mais celui de l'établissement dans lequel ce personnel exerce son activité.

La formulation énoncée dans les articles L 521-2 à 6 du Code du Travail dit clairement que l'ensemble des personnels de l'Etat est régi par ces articles indépendamment de toute référence à leur statut.

Pour le personnel de droit public, l'absence de travail entraîne de droit et obligatoirement une retenue d' l/30ème indivisible de traitement quelque soit la raison de cette absence et sa durée au cours d'une même journée. La légalité de cette retenue doit s'analyser au regard des textes en vigueur, de la décision du Conseil Constitutionnel de 1987 et de la Jurisprudence.

L'évolution des textes se fait à partir de l'article 4 de la loi n°61-825 du 19 Juillet 1961, de l'article premier du décret n° 62-765 du 06 Juillet 1962, de l'article de loi n° 63-777 du 31 Juillet 1963, des articles 1 et 6 de la loi du 31 Juillet 1963 qui sont devenus les articlesL 521-2 et L 521-6 du Code du Travail. Ceci est complété par la loi n°77-826 du 22 Juillet 1977 modifiant l'article 4 de la loi du 29 Juillet 1961.

Une confirmation nous est donnée par la loi n°82-889 du 19 octobre 1982 dont l'article 3 modifiait l'article L 521-6 du Code du Travail. Le Conseil Constitutionnel a admis la constitutionnalité de l'abrogation des articles 1 et 2 de la loi de 1982 mais non celle de l'article 3. Les articles 1 et 2 de la loi de 1982 conservent leurs effets. La loi de 1987 a remis en vigueur l'article 4 de la loi de 1961 complété par la loi de 1977 ;


La lecture combinée de ces textes conduit à conclure que :
-la règle de la retenue du l/30ème indivisible est rétablie à l'égard des fonctionnaires de l'Etat ou des agents non titulaires bénéficiaires d'un traitement qui se liquide par mois,
-les modalités de retenue définies par l'article 2 de la loi de 1982 s'appliquent à l'égard des personnels non soumis à l'article 1 de cette loi,
-sont soumis aux dispositions de l'article 1 de la loi de 1982, le personnel des administrations, des services dotés d'un statut particulier et tous les bénéficiaires d'un traitement ou salaire qui se liquide par mois,
-l'article L 521-2 du Code du Travail dispose que sont soumis aux dispositions de la section""GRÈVE DANS LES SERVICES PUBLICS" ces personnels,
-l'article L 521-6 du Code du Travail précise que pour les personnels non visés à l'article 1 de la loi de 1982, les retenues pour grève s'opèrent selon les modalités de l'article 2 de la loi de 1982.

Il résulte nécessairement de ces dispositions que le personnel demandeur en l'instance, bénéficiant d'un salaire liquidé par mois entre dans l'exception visée par l'article L 521-6 et que les retenues pour fait de grève doivent être opérées dans les conditions de l'article 1 de la loi de 1982, c'est-à-dire par trentième indivisible. Il est démontré que les modalités de retenues sur rémunération appliquées aux requérants sont parfaitement justifiées.

Les règles de retenues appliquées par FRANCE TELECOM ne peuvent être ici retenues.

 

Sur la demande reconventionnelle

LA POSTE a été contrainte d'engager des frais non compris dans les dépens pour assurer la défense de ses intérêts. En conséquence, il apparaît juste et équitable de lui allouer une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du NCPC.


 

 

MOTIVATIONS DU CONSEIL

 

Sur la jonction


Attendu que les instances enrôlées sous les n° 2001/255 à 269 dont est saisi le Conseil, le saisissent de prétentions et moyens similaires, de telle sorte qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les juger ensemble ;

Qu'il sera ordonné leur jonction ;

 


Sur la compétence du Conseil des Prud'hommes de VANNES


Attendu qu'aux termes de l'article 74 du NCPC, les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond et fins de non recevoir;


Attendu que le litige qui oppose les demandeurs et LA POSTE a fait l'objet d'une procédure devant la formation de référé du Conseil de VANNES et que LA POSTE n'a pas soulevé l'existence d'une question préjudicielle, l'exception préjudicielle sera rejetée, le Conseil de Prud'hommes de VANNES se déclarera compétent pour connaître le litige.

Attendu que le litige qui est soumis au Conseil de céans n'implique nullement l'appréciation de la légalité d'un quelconque acte réglementaire mais est un litige relevant du droit privé.

 

Sur les règles applicables concernant la retenue sur salaire des salaries grévistes


Attendu que les demandeurs ont été embauchés par LA POSTE sous contrat de droit privé


Attendu l'accord collectif appelé "Convention Commune POSTE-FRANCE TELECOM" conclu le 04 novembre 1991 qui prévoit que deux types de personnel sont régis par des statuts différents, des personnels de droit public et des personnels de droit privé. Que ces derniers sont soumis aux dispositions du Code du Travail et de la Convention Commune.

Attendu qu'il n'existe pas de dérogation expresse concernant le statut des salariés de droit privé, particulièrement en ce qui concerne la retenue sur rémunération des temps d'absence pour fait de grève ; que de ce fait, c'est le Code du Travail qui s'applique.

Attendu que le fait d'avoir un salaire qui se liquide par mois ne peut être retenu.

Attendu que LAPOSTE ne peut se prévaloir de règles spécifiques pour interdire l' alignement des salaires entre salariés fonctionnaires et salariés de droit privé et refuser des différences entre ces mêmes statuts concernant la retenue sur rémunération des absences pour fait de grève ; que l'application systématique à minima envers les salariés de droit privé serait de la discrimination envers ce statut.


Attendu que l'exercice du droit de grève dans les services publics est régi par les dispositions des articles L 521-2 du Code du Travail.

Attendu l'article L 521-2 du Code du Travail concernant les dispositions s'appliquant au personnel des entreprises publiques, industrielles et commerciales, et particulièrement au personnel des entreprises visées à l'article 2 de la Loi n° 82-889 du 19/10/1082 ce qui est le cas des demandeurs.

Attendu que l'article 2 de la Loi précitée précise que la retenue sur le salaire de ces personnels doit être de l/160ème du salaire mensuel.

Attendu l'article L 521-6 du Code du Travail qui précise que la retenue sur salaire pour le personnel non visé à l'article 1 de la Loi 82-889 du 19 octobre 1982, ce qui est le cas des demandeurs, doit être opérée en fonction des durées d'absence définies par l'article 2 de la dite Loi.

 

Sur l'intervention volontaire du syndicat SUD PTT du MORBIHAN


Attendu l'article L 411-11 du Code du Travail qui reconnaît aux syndicats professionnels le droit d'ester en justice pour des faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.

Attendu qu'il s'agit bien ici d'un préjudice subi par des salariés intéressant l'ensemble des salariés de droit privé de LA POSTE, la demande du syndicat SUD PTT du MORBIHAN sera reconnue recevable.

 

Sur les frais irrépétibles


Attendu les frais qu' ont dus engager les demandeurs pour faire reconnaître leurs droits, il leur sera accordé à chacun la somme de 150 € au titre de l'article 700 du NCPC, LA POSTE étant condamnée aux entiers dépens de l'instance, le syndicat SUD PTT étant débouté de sa demande non justifiée d'article 700.

 

Sur la demande de frais irrépétibles de la partie défenderesse


Attendu que LA POSTE succombe en l'instance, elle sera déboutée de sa demande reconventionnelle.




 

 

PAR CES MOTIFS


Le Conseil de Prud'hommes de VANNES, section COMMERCE, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

ORDONE la jonction des instances enrôlées sous les n° 01/255 à 269.


REJETTE l'exception tirée d'une question préjudicielle conformément à l'article 74 du NCPC,

Se déclare compétent pour connaître le litige s'agissant d'un contrat de travail de droit privé,


Dit que pour l'exercice du droit de grève la retenue qui s'applique est celle définie dans l'article 2 de la Loi du 19 Octobre 1982,

 


En conséquence, CONDAMNE LA POSTE à verser à titre de rappel de salaire les sommes suivantes :


-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à M. CREQUER Daniel
-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à M. GOURLAY Stéphane
-SOIXANTE DEUX EUROS DIX HUIT (62,18 €) à Mlle GOURLAY Edith
-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à Mme GUILLO Marie-Laure
-SOIXANTE ET ONZE EUROS QUARANTE SIX (71,46 €) à Mme GUYONVARCH Yveline
-TRENTE SIX EUROS SOIXANTE QUINZE (36,75 €) à M. LAGATU Yann
-TRENTE QUATRE EUROS VINGT (34,20 €) à M. LEALOI Soane Patita
-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à Mlle LE BRAS Stéphanie
-SOIXANTE DOUZE EUROS ZERO TROIS (72,03 €) à M. LEBRUN Stéphane
-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à Mlle MOREL Nadine
-SOIXANTE DILX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à M. VALSEMEY André
-TRENTE SIX EUROS VINGT HUIT (36,28 €) à Mlle TANGUY Roselyne
-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à Mme MALABOEUF Valérie
-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à M. MONTMEAT Yvonnig
-SOIXANTE DIX EUROS QUATRE VINGT DIX NEUF (70,99 €) à Mme OLIVE Murielle

Condamne LA POSTE à verser à chacun des demandeurs la somme de 150 € au titre de l'article 700 du NCPC,

Dit que le syndicat SUD PTT est recevable dans sa demande fondée sur l'article L 411-11 du Code du Travail, en conséquence, condamne LA POSTE à lui verser 1 € à titre de dommages et intérêts,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Condamne LA POSTE aux entiers dépens de l'instance,

Ainsi jugé par le Conseil de Prud'hommes de VANNES, sis 14 rue Richemont -3ème étage-
et prononcé à l'audience du 25 NOVEMBRE 2002.

LE GREFFE.