COUR D'APPEL DE CAEN |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
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APPELANTE
: Représentée par Me Olivier LANGEARD, avocat au barreau de CAEN
INTIMES Madame
Isabelle BAUE Monsieur
Denis CHASSEROT
Monsieur
Joël FEVRIER
Monsieur
Guillaume LELAIDIER Monsieur
Stéphane LESOMPTIER
Monsieur
Guy TCHEOU
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE Monsieur
DEROYER, Président, DEBATS: A l'audience publique du 03 Mai 2002 GREFFIER: Mademoiselle GOULARD
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Monsieur
Mohamed AMAZOUZ, Madame Isabelle BAUE, Monsieur Denis CHASSEROT, Madame
Sonia DELACOUR épouse TCHEOU, Monsieur Joël FEVRIER, Madame
Emmanuelle LEBOUCHER, Monsieur Fabien LEBOUCHER, Monsieur Guillaume LELAIDIER,
Monsieur Stéphane LESOMPTIER, Monsieur Thierry LETOURNEUX, Monsieur
Guy TCHEOU, salariés de LA POSTE ont été affectés
à l'agence de MONDEVILLE du service DILIPACK. Pour les déplacements qu'ils ont effectués dans l'exercice de leurs fonctions, ces onze salariés revendiquent le bénéfice du forfait repas de 85 francs prévu à l'article 43 de la décision n° 890 du 15 juin 1995 prise par LA POSTE à la suite d'une résolution de son conseil d'administration. En
outre, Monsieur Mohamed AMAZOUZ et Monsieur Thierry LETOURNEUX revendiquent
une qualification supérieure à celle qui leur a été
reconnue et sollicitent les rappels de salaires correspondants. Enfin,
Madame Sonia DELACOURT épouse TCHEOU sollicite le versement d'une
indemnité en réparation du préjudice qu'elle a subi
du fait du non respect par LA POSTE de la règle de publicité
des postes vacants prévue à l'article 18 de la convention
commune LA POSTE -FRANCE TELECOM. Faute
d'obtenir une réponse favorable à leurs revendications,
les salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour Faire valoir
leurs droits. Vu
le jugement rendu le 19 juin 2001 par le conseil des prud'hommes de Caen
; Vu
les conclusions déposées et exposées à l'audience
du 3 mai 2002 par LA POSTE, appelante; Vu les conclusions déposées et exposées à l'audience du 3 mai 2002 par Monsieur Mohamed AMAZOUZ, Madame Isabelle BAUE, Monsieur Denis CHASSEROT, Madame Sonia DELACOURT épouse TCHEOU, Monsieur Joël FEVRIER, Madame Emmanuelle LEBOUCHER, Monsieur Fabien LEBOUCHER, Monsieur Guillaume LELAIDIER, Monsieur Stéphane LESOMPTIER, Monsieur Thierry LETOURNEUX, Monsieur Guy TCHEOU, appelants incidents;
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le
22 février 1999, Madame Sonia DELACOUR affectée à
l'agence DILIPACK de Mondeville a présentée une demande
de mutation à un poste d'opérateur dans une agence de Bretagne
ou de Haute Normandie. A
la fin de l'année 1999, LA POSTE a ouvert un nouveau dépôt
râlais DILIPACK à Saint-Ségal dans le Finistère
et il n'est pas contesté qu'à l'occasion de cette ouverture
aucune publication de postes vacants n'a été effectué. Toutefois, LA POSTE démontre par les pièces versées aux débats que ce salarié s'est vu confier une mission de chef d'équipe, ce qui ne correspondait pas à la demande de Madame DELACOUR formulée le 22 février 1999 et réitérée le 4 août suivant qui visait un poste d'opérateur sans tournée dans une agence de Bretagne ou de Haute Normandie. Elle
observe également que le poste de chef d'équipe ne correspondait
pas aux compétences de Madame DELACOUR. Par ailleurs, elle affirme qu'aucun recrutement n'a été effectué pour pourvoir un poste fixe d'opérateur dans la nouvelle agence du Finistère, de sorte que la demande de Madame DELACOUR ne pouvait être satisfaite. Cependant,
cette affirmation n'est aucunement démontrée par LA POSTE
qui ne précise pas les postes qui ont été créés
dans cette nouvelle agence A fortiori, elle n'établit donc pas
l'absence de tout poste conforme aux capacités de Madame DELACOUR. En ne respectant pas la règle de publication des postes vacants à la suite de l'ouverture de sa nouvelle agence dans le Finistère, LA POSTE a donc privé Madame DELACOUR de la possibilité d'avoir connaissance en temps utile des postes à pourvoir dans cette nouvelle agence et de formuler, le cas échéant, une demande de mutation plus précise, non seulement en se portant candidate à un poste d'opérateur fixe éventuellement disponible, mais également en modifiant sa demande pour saisir une autre opportunité. Dès lors, cette perte de chance a occasionné à Madame DELACOUR un préjudice imputable au manquement de LA POSTE à ses obligations contractuelles qui ouvre droit à réparation sur le fondement de l'article 1147 du code civil. En
conséquence, il y a lieu de condamner LA POSTE a payer à
Madame DELACOUR la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts. Le jugement sera réformé en ce sens.
2. - Sur la demande de rappel de salaire de Monsieur AMAZOUZ sollicité à raison de sa qualification professionnelle
Monsieur
AMAZOUZ affirme qu'à compter du mois de janvier 1998, il lui a
été confié la gestion de l'équipe du soir
constituée de 5 à 8 opérateurs et revendique la qualification
de chef d'équipe niveau 2.3. LA
POSTE s'oppose à cette prétention en faisant valoir que
les activités exercées par Monsieur AMAZOUZ ne correspondaient
qu'à un poste d'opérateur animateur classé au niveau
2.l auquel l'intéressé n'a pu être promu rapidement
faute d'avoir été sélectionné à l'examen
organisé en novembre 1999 dans le cadre des procédures de
promotion interne permettant l'accès à ce niveau. Elle précise
également que Monsieur AMAZOUZ s'est représenté en
décembre 2000 à un nouvel examen auquel il a été
admis, ce qui lui a permis de se voir proposer un poste de chef d'équipe
qu'il a accepté en mars 2001. La
fiche de poste de Monsieur AMAZOUZ en date du 11 janvier 1999 mentionne
la fonction d'animateur de chantier chargé du tri départ
et celle qu'il a signée le 4 octobre 1999 indique le rattachement
de son poste de travail à la qualification d'opérateur animateur,
fonction qui, selon les pièces versées aux débats,
a été identifiée à l'occasion de la rencontre
sociale du 12 mai 1999 pour répondre à la nécessité
d'adapter l'organisation des agences Dilipack créées en
1997 au développement de leur activité et à la croissance
de leur effectif. Cependant,
il n'est pas établi que ces ajustements aient eu nue incidence
sur les attributions de Monsieur AMAZOUZ qui s'était vu confier
antérieurement les fonctions de chef d'équipe. Dans
ces conditions» Monsieur AMAZOUZ qui, ainsi qu'en attestent plusieurs
de ses collègues, s'est vu confier la gestion d'une équipe
de 5 à 8 opérateurs travaillant le soir dans une autre tranche
horaire que le chef d'équipe en titre qui ne pouvait donc pas le
superviser, était en droit de se voir reconnaître la niveau
de qualification correspondant à ses attributions effectives, sans
attendre une promotion conditionnée par une évaluation positive
de ses compétences. En
effet, si LA POSTE peut légitiment soumettre à des évaluations
de compétences l'accès de ces agents aux différents
niveaux de qualification définis en tenant compte de la nature
qualitative et quantitative des tâches à accomplir, la condition
de réussite à un examen professionnel ne peut être
opposé qu'aux agents postulant à un niveau d'emploi qu'ils
n'ont pas encore atteint et qui n'exercent pas encore les fonctions correspondante. Dès lors, que la Poste avait confié à Monsieur AMAZOUZ, à compter du mois de janvier 1998, les fonctions de chef d'équipe du soir qu'il exerçait pleinement, avant même qu'il ait passé avec succès l'examen nécessaire, le salarié pouvait prétendre, à compter de cette date, à la qualification de chef d'équipe niveau 2.3. En conséquence, il y a lieu de faire droit à la demande de rappel de salaire sollicité par Monsieur AMAZOUZ à raison de sa qualification professionnelle qui n'est pas discutée dans son montant.
En février 1997, Monsieur LETOURNEUX a été engagé en qualité d'agent contractuel opérateur ni veau 1.2 et affecté à des tâches d'opérateur en agence consistant essentiellement au tri des colis avant distribution. Monsieur
LETOURNEUX affirme qu'il lui a été ensuite demandé
de prendre en charge une équipe de distribution jusqu'en juin 1998,
puis qu'à compter du mois de septembre 1998 à l'issue d'un
arrêt de travail consécutif à un accident du travail,
il s'est vu confier la responsabilité de la gestion d'un service
après vente et revendique à ce titre la qualification d'assistant
en agence niveau 2.2. LA
POSTE s'oppose à cette prétention en faisant valoir que
les activités exercées par Monsieur LETOURNEUX ne correspondent
pas à la qualification d'assistant en agence pour laquelle il ne
dispose ni de la formation ni de la compétence nécessaire. Elle
précise également que l'affectation de Monsieur LETOURNEUX
correspond à un reclassement à la suite d'un arrêt
de travail du 4 juin au 8 septembre 1998 et d'une inaptitude définitive
à ses précédentes fondions. Dans
un courrier en date du 4 mars 1999, le directeur départemental
du Calvados fait état de cette situation et indique qu'il ne dispose
pas de poste adapté au handicap de Monsieur LETOURNEUX, mais que
ce dernier a effectué ponctuellement des remplacements d'assistant
et qu'il serait capable d'effectuer des opérations de guichet et
de comptabilité. La
fiche de poste du 11 janvier 1999 signée par Monsieur LETOURNEUX
mentionne la fonction d'appui à l'assistante et indique ; Le
courrier du directeur départemental et la fiche de poste de Monsieur
LETOURNEUX tendent donc à confirmer que la fonction confiée
à l'intéressé n'est pas d'un niveau équivalent
à l'assistante qu'il appuie ou remplace ponctuellement. Monsieur LETOURNEUX qui ne démontre pas exercer pleinement les fonctions correspondant, selon la grille de classification conventionnelle, à l'emploi d'assistant en agence niveau 2.2, ne justifie donc pas remplir les conditions requises pour obtenir un classement au niveau 2.2 qu'il revendique à compter de septembre 1998. En
conséquence, il y a lieu de débouter Monsieur LETOURNEUX
de sa demande de rappel de salaire sollicité à raison de
sa qualification professionnelle. Le jugement sera réformé en ce sens.
4. - Sur les demandes de rappels d'Indemnités repas des onze salariés
Cet article 43 - Forfait repas en métropole - qui s'inscrit dans le cadre des dispositions relatives à l'indemnisation des frais de d'hébergement et de restauration prévoit : L'agent
est remboursé de ses frais de repas sur une base forfaitaire fixée
à 85 F. sans présentation de pièces justificatives. LA
POSTE s'oppose à la prétention de ses salariés en
soutenant que le bénéfice du forfait repas ainsi prévu
est réservé aux déplacements professionnels évoqués
au chapitre X (article 40 à 42) de la convention commune LAPOSTE
- FRANCE TELECOM applicable au personnel contractuel des deux exploitants
publics, c'est-à-dire aux missions temporaires de plus ou moins
longues durées en France ou à l'étranger et en aucun
cas aux déplacements effectués par les salariés dans
leur agglomération d'affectation à l'occasion de l'exercice
normal de leur activité. Toutefois,
il ressort de la résolution du conseil d'administration de LA POSTE
prise le 6 avril 1995 que la décision de LA POSTE n° 890 du
15 juin 1995 a pour objet de mettre en oeuvre un nouveau système
d'indemnisation des frais de déplacement engagés pour l'exécution
du service. Or,
la notion de déplacement envisagée dans ce nouveau cadre
qui doit seule prévaloir est définie à l'article
31 de la décision du 15 juin 1995 dans le cadre de ses dispositions
générales. Cet article 31 indique : Est considéré en déplacement dans des conditions de droit commun, tout agent se déplaçant pour les besoins du service, hors de son agglomération de résidence personnelle et hors de son agglomération d'affectation.Toutefois, s'iI apparaît que le déplacement hors des agglomérations de résidence personnel et d'affectation implique un temps de trajet de très courte durée, le directeur pourra considérer qu'il n'y a pas de déplacement (exemple : transports en commun existants, agglomération multicommunale, communauté urbaine,,,),,. En outre l'article 32 précise : Peuvent être considérées comme grandes agglomérations et donc comme une seule et même résidence, les communautés urbaines, les agglomérations multi-communales, les villes nouvelles ...ou toute agglomération et sa banlieue ou ses communes limitrophes, dans lesquelles existe un réseau de transport en commun ou des temps de trajet très courts (exemples : Paris et 1ere couronne....)
Or, il est établi que les salariés demandeurs affectés à l'agence de MONDEVILLE du service DHJPACK effectuaient leurs tournées quotidiennes de distribution de colis dans un secteur qui dépassait les limites de l'agglomération caennaise, puisque l'agence couvrait les trois départements de la Basse Normandie, le Calvados, l'Orne et la Manche. Dès
lors, il y a lieu de confirmer le jugement déféré
en ce qu'il a dit que Monsieur Mohamed AMAZOUZ, Madame Isabelle BAUE,
Monsieur Denis CHASSEROT, Madame Sonia DBLACOUR épouse TCHEOU,
Monsieur Joël FEVRIER, Madame Emmanuelle LEBOUCHER, Monsieur Fabien
LEBOUCHER, Monsieur Guillaume LELAIDIER, Monsieur Stéphane LESOMPTIER,
Monsieur Thierry LBTOURNEUX, Monsieur Guy TCHEOU étaient fondés
à réclamer une indemnité de repas de 85 francs (soit
12,96 euros) pour chaque tournée journalière ne leur ayant
pas permis de prendre leur repas de midi soit, dans leur agglomération
d'affectation, soit dans une agglomération possédant un
restaurant d'entreprise ; En
outre, il y a lieu de faire droit aux demandes des salariés tendant
au versement d'une provision sur les sommes qui leur sont dues à
titre d'indemnités de repas et en conséquence de condamner
LA POSTE à payer à : Le jugement sera complété sur ce point.
5. - Sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
DECISION
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Confirme
le jugement déféré en ce qu'il a dit que Monsieur
Mohamed AMAZOUZ, Madame Isabelle BAUE, Monsieur Denis CHASSEROT, Madame
Sonia DELACOUR épouse TCHEOU, Monsieur Joël FEVRIER, Madame
Emmanuelle LEBOUCHER, Monsieur Fabien LEBOUCHER, Monsieur Guillaume LELAIDIER,
Monsieur Stéphane LESOMPTIER, Monsieur Thierry LETOURNEUX, Monsieur
Guy TCHEOU étaient fondés à réclamer une indemnité
de repas de 85 francs (soit 12,96 euros) pour chaque tournée journalière
ne leur ayant pas permiis de prendre leur repas de midi soit, dans leur
agglomération d'affectation, soit dans une agglomération
possédant un restaurant d'entreprise ; Et
le réformant pour le surplus, Condamne
LA POSTE à payer à Madame Sonia DELACOUR la somme de 1500
euros à titre de dommages et intérêts ; Déboute
Monsieur LETOURNEUX de sa demande de rappel de salaires sollicité
à raison de sa qualification professionnelle; Y
ajoutant, Condamne
LA POSTE à payer à titre de provision sur les sommes dues
à titre d'indemnités de repas à:
Condamne
LA POSTE aux dépens.
LE
PRESIDENT
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